Electric Pyramid
Immédiat et familier
Il est des musiques qui jamais ne disparaîtront tant elles réveillent les sens, Electric Pyramid pérennise une tradition, celle d’une énergie toujours renouvelée parce qu’aussi immédiate que familière.
L’ouvrage, du classic rock comme disent les américains, est ici indéfiniment remis sur le métier, avec une formule connue, guitares-basse-batterie et un chanteur. Le but ? La quête du morceau parfait.
Et s’il existait un club dont Pearl Jam, U2, Led Zeppelin, Eagles, Nirvana ou Weezer seraient les gardiens, nul doute qu’ils l’adouberaient immédiatement.
La musique d' Electric Pyramid, ne s’explique pas elle s‘écoute, c’est une alchimie qui surgit comme par magie. Quintet emmené par Ol Beach au micro, non content d’avoir concentré les énergies, il est aussi le principal artisan des textes.
Son parcours est singulier. Après de longues études de piano qui le destinaient à devenir concertiste, il réalise que la musique instrumentale n’est pour lui pas une finalité. Il se réoriente donc vers le chant. « J’avais envie d’écrire, de raconter des histoires, concertiste ne me satisfaisait pas. Comme j’écoute du rock depuis toujours, je me suis dis que c’était la solution. J’ai passé de longues années à étudier l’harmonie et le contre-point, mais j’ai également grandi avec Queen si on peut dire, mon père était leur manager, je les ai donc toujours écouté et apprécié. Même si ado, je préfère un son plus lourd comme le grunge, et je me rend compte que Queen est souvent cité par les groupes américains que je privilégie, la boucle était bouclée. »
Si Ol est anglais, il grandit en Suisse et les carrières de Johnny Hallyday, Serge Gainsbourg ou Georges Brassens n’ont également aucun secret pour lui. Maniant parfaitement le français, cette quête de textes souvent poétiques est bien évidemment une réminiscence de sa double culture, comme une envie de donner du corps à ses paroles. Ses chansons sont de surprenantes visions poétiques de la vie.
Ol est aussi celui qui a le plus d’expérience, avec déjà plusieurs lignes noircies sur son CV. L’un de ses premiers groupes s’appelait Wire Daisies, une formation qui a sorti deux albums (Just Another Day en 2004, Wire Daisies en 2007). Mais sans doute un peu trop sage et calme, il n’a pas réellement convaincu
Oli bouillonnait d’impatience et attendait derrière son clavier le bon moment. Suivra YelloWire qui marque un progrès, car désormais il chante, et leur album sorti en 2011 Machines On Fire apparait rétrospectivement comme un brouillon bien avancé de ce nouveau projet. L’heure de s’émanciper pleinement s’approchait, ne manquait plus que les bons musiciens pour l’accompagner.
Les deux guitaristes Linus Taylor (il a joué avec Bryan Ferry) et Christian Mendoza (il a accompagné Nelly Furtado et Vernon Reid) donnent du corps à la voix légèrement râpeuse d’Oli. En parallèle, le renfort de Chris Brice à la batterie (musicien de Coldplay en tournée) et de Luigi Casanova à la basse (il a longtemps assuré au côté du bluesman prodige Joanne Shaw Taylor) permet d’asseoir une solide assise rythmique.
« Avec les autres on se connaissait de Londres, avec Linus on s’est rencontré dans un festival, avec Christian dans un bar. On a commencé à jouer ensemble de façon informelle et puisque l’on s’entendait très bien, il semblait naturel d’approfondir la chose, monter un groupe. C’est parfois difficile, mais ça permet d’explorer de nouveaux horizons, nous emmenant dans un endroit où nous ne serions jamais allé seul. C’est la meilleure façon de progresser, la seule même.
Le rock n’est jamais mort à Londres. Il y a toujours eu des clubs plus ou moins underground où se retrouver, comme une grande famille qui aurait gardé des liens invisibles, une sorte de face cachée résistante attendant son heure. Formés en 2016, on a sorti un premier album juste après le COVID, ce qui n’était peut-être pas le meilleur timing, puis celui-ci dont j’ai égaré le premier master et qu’il a fallu intégralement réenregistrer. Ça nous a fait perdre un peu de temps mais nous n’avons jamais perdu espoir… »
C’est ainsi qu’Ol résume la genèse et les premières années d’Electric Pyramid, oubliant de préciser qu’entre temps le groupe n’a jamais manqué une occasion de jouer, convainquant même, le producteur John Cornfield, de s’associer avec eux. Muse, Robert Plant, Supergrass et Oasis sont quelques-uns des artistes passés dans son studio, ils pourraient être d’autres membres du club précédemment cité, dans lequel Electric Pyramid se glisserait le plus naturellement du monde.
Ce deuxième album s’intitule Lion, c’est également le titre d’une chanson Lions, peut-être la plus chère dans le cœur d’Ol. « J’ai une petite fille et dès sa première nuit elle était très malade, elle avait une jaunisse. Mais avec sa maman, on savait que derrière cette fragilité apparente se cachait une volonté insoupçonnable, et j’ai immédiatement pensé au roi de la forêt. Mes paroles parlent de cette force de la nature qui venait d’apparaître sur Terre. Malgré le moment difficile, il y avait un grand optimisme, exactement comme dans la chanson Diorama qui ouvre le disque. On nous montre souvent les mauvais côtés de l’humanité, mais il y a des choses magnifiques aussi, qui finissent toujours pas se révéler. Il faut juste être patient et savoir les regarder… »
Une autre chanson s’intitule Land Of Ghosts, non pas une histoire de morts-vivants ou de fantômes, mais de vie éternelle, car quelque soit la durée de notre existence sur Terre, celle-ci sera toujours microscopique par rapport à l’histoire de l’humanité. Mais, et c’est là toute la subtilité de la chose, ce n’est pas pour cela que la vie s’arrête, notre empreinte, notre âme, notre mémoire continuera à y errer... Car, nous ne nous éteignons jamais complètement.
Le fond est l’un des atouts de ce disque, la forme parfois emportée mais également souvent caressante en est un autre. Et si les guitares sont autant mises en avant, c’est comme le dit en plaisantant Ol parce que « Dans un groupe, c’est toujours elles qui font la loi ! » Mais au final, qui va s’en plaindre ?